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Assurer la relève progressive d’un père talentueux à la réputation brute et sans concession peut se vivre comme un challenge ou au contraire comme un apprivoisement. S’effacer progressivement face à un fils qui  trouve et impose son identité et sa signature architecturale peut se traduire comme une simple transmission ou au contraire comme une ouverture au partage d’expériences.

Chez les Vynckier, Jean-Marc 73 ans et Théo 27 ans, le temps est une notion importante qui permet d’observer, de tester, de provoquer. Rien n’est jamais acquis, rien n’est noir ou blanc. Tout se forme, s’écrit et se crée avec une remise en question constante des évidences jusqu’à trouver la réponse absolue ! Tous les deux inscrits dans cette démarche, et après trois années de collaboration, la transition se fait en bonne intelligence, patiemment. Chacun occupe sa place, le père cédant peu à peu de terrain au fils. Le fils prend peu à peu son envol sous l’oeil complice et exigeant du père. Une histoire de transmission du nom et de l’identité Vynckier qui s’inscrit dans la continuité, en douceur, tout en affirmant une nouvelle voie. La relève d’une grande signature est en chemin.

Que découvrez-vous de l’autre dans cette étape de passation ?

Jean-Marc : Théo a une grande capacité d’observation et d’écoute, ce qui nourrit notre belle complicité et complémentarité. Il a très vite compris ce qu’était l’Architecture intérieure et la création.

Théo : Beaucoup de sagesse ! Depuis mon arrivé à l’agence, je découvre mon père sous un autre visage, détendu avec l’envie de m’apprendre son métier, de me transmettre sa passion. Je pense qu’il attendait ça depuis un petit moment.

Quel avenir vous imaginez-vous ? 

Jean-Marc : Arrêter est impossible ! Je me vois comme « accompagnateur » de Théo, notamment dans les parties techniques et concrètes des dossiers et des chantiers. Je souhaite continuer à lui transmettre mes connaissances et mon expérience le plus longtemps possible. Un peu plus dans l’ombre, tout en continuant à être cette tête chercheuse.

Théo : J’ai un peu peur de penser à l’avenir car je me sens bien dans cette formation père/fils. Nous évoluons dans une totale complicité. Il me faudra trouver un « camarade » de route pour poursuivre cette aventure professionnelle car je ne me vois pas effectuer ce travail seul. Les candidatures sont donc ouvertes. 

Quelle qualité appréciez-vous chez l’autre ? 

Jean-Marc : Sa détermination, son instinct, son intuition. Et surtout sa curiosité dans sa recherche constante de nouveaux lieux. Son renouvellement permanent. Et sa passion pour la musique et la composition de son groupe. J’aime son enthousiasme et sa personnalité.

Théo : Sa facilité à vendre du désir !  Je pense vraiment que c’est la base de notre métier.

Quelle place vous faites-vous dans ce duo transgénérationnel ? 

Jean-Marc : Travailler avec son fils est une chance. La complémentarité entre deux générations est fulgurante quand elle partage une intelligence, une vivacité de création, une sagacité à saisir le sens de la beauté, de la matière, de la lumière, de l’espace, des perspectives, des volumes. Théo a la capacité d’apprendre et de donner. 

Théo : La place du gentil ! Aujourd’hui je suis encore un « élève », j’apprends mon métier. Au niveau esthétique, je sais parfaitement ce que je veux et mon père me laisse beaucoup de liberté sur la création. Il est présent pour me faire redescendre sur terre et me rappeler les contraintes techniques que l’on retrouve partout dans ce métier. 

Quelles leçons professionnelles tirez-vous de cette expérience ?  

Jean-Marc : Avoir une disposition naturelle, une aptitude à sentir et à faire quelque chose de beau est essentiel. L’audace donne de la puissance, du génie et de la magie. Et permet d’exister dans l’exercice du métier tout en continuant à travailler et à apprendre.

Théo : Même si j’accompagne mon père depuis plus de 15 ans sur les chantiers, ça ne fait que 2 ans et demi que je bosse avec lui. Je découvre tout du monde professionnel. J’apprends une façon de travailler qui me correspond parfaitement, basée sur l’envie et le plaisir. Le jour où le plaisir n’existera plus, j’aurai à me poser des questions. 

www.aproposdelieu.com – portraits père&fils – crédit photo@DOROTHEE CARY